Regards d’un anthropologue sur le Jourdain

Actuellement doctorant à l’Ecole Biblique et Archéologique Française de Jérusalem, Marc Dugas répond aux questions d’Aziliz Le Roux sur son parcours et ses motivations. Son travail nous éclaire sur la richesse mais aussi la complexité du lieu.

Quel est ton parcours et comment as-tu choisi ton sujet de thèse ?

Je suis venu ici pour la première fois en 2000, pour une tout autre raison puisqu’à l’époque je travaillais dans un centre culturel. Les années suivantes, jusqu’en 2010, j’ai beaucoup voyagé, aux îles du Cap-Vert, au Liban, au Yémen. À moment donné, j’ai voulu reprendre le contrôle de ces voyages. Je voulais aussi me mettre au pied du mur, me contraindre à poser plus de questions, à passer plus de temps avec les gens d’ici. Or cette curiosité est la base des sciences sociales !

Mon premier séjour ici m’avait marqué, surtout la lumière de la vallée du Jourdain. Une amie anthropologue a attiré mon regard vers le lieu associé au baptême de Jésus, sur les deux rives du Jourdain, aujourd’hui entre Jordanie et Palestine. Sous sa direction, j’ai fait un master de sciences sociales des religions. Puis l’Institut français du Proche-Orient m’a permis de continuer en thèse. J’ai passé deux ans à l’IFPO à Amman. Maintenant, comme boursier de l’Académie, j’ai un an pour écrire, ici, à l’Ébaf.

Le lieu dont je fais l’ethnographie est un lieu saint aussi important qu’ambigu. Il est traversé par une frontière. Il fonctionne comme une illusion d’optique. Religieusement, il s’agit d’un seul et unique lieu, réparti sur les deux rives ; mais politiquement les deux rives sont autonomes, il y a deux lieux saints distincts voire concurrents. Le saint des saints de ce lieu saint-là, au milieu du Jourdain, se superpose au tracé frontalier, c’est-à-dire à un non-lieu politique. Je dirais qu’il s’agit d’une sorte de hiatus perceptif. Au lieu du baptême, deux cartes sont superposées. La carte politique de la région, fixée en 1967, rencontre une carte religieuse beaucoup plus profonde et ancienne. La carte politique est la plus perceptible, au sens qu’il est interdit de traverser le Jourdain ! Mais, souterrainement, la carte religieuse continue de produire des effets, notamment rituels.

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Retrouvez l’interview dans son intégralité sur le site de l’Ecole Biblique et Archéologique Française de Jérusalem.

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